Retour du rouge. Après deux belles séances sur des signes indiquant que Donald Trump reconsidère les aspects les plus agressifs de ses positions sur le commerce mondial et la Réserve fédérale, les futures pointent pour une ouverture en repli à Wall Street. "Le danger de se fier aux gros titres, c'est que les commentaires changent quotidiennement et que, plus tard, le discours pourrait changer", explique à 'Bloomberg' Brent Schutte, directeur des investissements chez Northwestern Mutual Wealth Management. "Il reste encore beaucoup à faire avant de connaître l'issue des droits de douane. Il faut se demander quand l'impact commencera à se faire sentir aux États-Unis".
D.Trump a indiqué que les États-Unis concluraient un accord équitable avec la Chine, ajoutant mercredi soir que le pays pourrait se voir appliquer un nouveau taux de droits de douane dans les deux à trois prochaines semaines. Mais Scott Bessent a émis des doutes sur une résolution rapide du conflit commercial entre les deux premières puissances mondiales. Le secrétaire au Trésor a déclaré que l'administration étudiait de multiples facteurs concernant la Chine, au-delà des seuls droits de douane, notamment les barrières non tarifaires et les subventions gouvernementales. Un rééquilibrage complet des échanges commerciaux pourrait prendre deux à trois ans, a-t-il souligné.
Preuve que rien n'est encore joué, la Chine a rejeté ce matin les ouvertures des États-Unis, exigeant la levée de tous les droits de douane et niant toute avancée dans les négociations. "Les États-Unis devraient... supprimer complètement tous les droits de douane unilatéraux... s'ils veulent vraiment résoudre le problème", a déclaré He Yadong, porte-parole du ministère du Commerce, qualifiant de "sans fondement" les informations faisant état de négociations en cours... Toujours sur le front de la guerre commerciale, l'administration envisage de réduire certains droits de douane visant l'industrie automobile, qui, selon les dirigeants des constructeurs, porteraient un coup dur aux profits et à l'emploi.
"Une guerre commerciale entre la Chine et les Etats-Unis est une situation perdante pour tous. Le bon sens nous dit que les deux nations finiront par s'asseoir à la table des négociations et par parvenir à un accord", écrit Bin Shi, responsable des actions chinoises chez UBS Asset Management. "Mais le calendrier et l'ampleur restent à déterminer (...) À ce stade, de nombreuses questions restent sans réponse, car l'évolution des droits de douane et les implications potentielles en matière d'investissement changent de jour en jour".
Dans l'agenda macro du jour, l'Indice d'activité nationale de la Fed de Chicago (14H30), les commandes de bien durable (14H30), les inscriptions hebdomadaires au chômage (14H30), et les reventes de logements existants (16H) seront à suivre. La journée s'annonce également chargée du côté micro avec une multitude de résultats d'entreprises : P&G, Merck&Co, PepsiCo ou encore Comcast dévoileront notamment leurs trimestriels avant l'ouverture, tandis que Alphabet, Intel et T-Mobile US seront de sortie ce soir.
Signe d'un regain de nervosité, le dollar, qui a souffert de la défiance sur la dette américaine, repart à la baisse ce jeudi avec un indice dollar qui cède 0,54% face à un panier de devises à 99 points, tandis que l'euro reprend 0,65% face au billet vert à 1,138$. Le Vix, le fameux indice de la peur, remonte en direction des 30 points. Sur le marché obligataire, le taux du 10 ans américain recule de 3,3 pb à 4,348%. L'or repart de l'avant (+1,3%) et se rapproche de son récent record à 3.500 dollars l'once. Enfin, sur le Nymex, le baril de brut WTI gagne 0,5% à 62,3$. Le bitcoin retombe vers les 92.000$.
Les valeurs
* IBM chute de plus de 8% en pré-bourse ce jeudi, après la publication de résultats trimestriels pourtant assez solides et de ses perspectives. Au premier trimestre, 'Big Blue' a réalisé un bpa opérationnel de 1,6$ contre 1,68$ un an plus tôt et 1,48$ de consensus, pour un chiffre d'affaires en hausse de 0,5% à 14,5 milliards de dollars, légèrement supérieur aux attentes des analystes. La marge brute ajustée est ressortie à 56,6% contre 55,6% de consensus. Le secteur des logiciels a continué d'être le segment d'IBM connaissant la croissance la plus rapide, avec des ventes en hausse de 7% à 6,3 Mds$. Le chiffre d'affaires du secteur du conseil a lui diminué de 2% à 5,1 Mds$.
IBM a maintenu ses prévisions pour l'ensemble de l'année d'environ 13,5 milliards de dollars de flux de trésorerie disponible et d'au moins 5% de croissance du chiffre d'affaires à taux de change constant, mais les dirigeants se montrent plus prudents concernant la division conseil cette année. "À court terme, l'incertitude pourrait inciter les clients à marquer une pause", a déclaré le PDG, Arvind Krishna, lors d'une conférence téléphonique après l'annonce des résultats. Il a néanmoins précisé qu'IBM n'avait "pas constaté de différence significative dans le comportement d'achat des clients". Le dirigeant a qualifié l'environnement économique de "fluide" et a reconnu que "pour les clients les plus directement impactés par la politique actuelle, le ralentissement pourrait être plus prononcé", selon des propos repris par 'Bloomberg'.
IBM est peu impactée par les politiques tarifaires américaines actuelles, a précisé James Kavanaugh, le directeur financier. L'entreprise a une exposition directe limitée hors des États-Unis et étudie des alternatives pour atténuer les taxes. Elle souffre en revanche des mesures de réduction des coûts du gouvernement américain, menées par le Département de l'efficacité gouvernementale d'Elon Musk, le fameux DOGE. La firme a indiqué qu'une quinzaine de contrats d'IBM avec le gouvernement fédéral ont été annulés ou suspendus, ce qui représente environ 100 millions de dollars de paiements futurs. Les ventes fédérales représentent moins de 5% du chiffre d'affaires global d'IBM, a indiqué J.Kavanaugh. IBM table sur un chiffre d'affaires pour le trimestre clos fin juin compris entre 16,40 et 16,75 milliards de dollars, supérieur aux attentes du marché. "Compte tenu de la dynamique d'incertitude sans précédent qui règne sur le marché, nous avons choisi de fournir une fourchette de prévisions de chiffre d'affaires pour le deuxième trimestre", a souligné le DF. "Nous avons estimé qu'il était de notre devoir d'offrir la plus grande transparence possible à nos investisseurs".
* Southwest Airlines abandonne 4% en pré-séance. La compagnie a retiré ses prévisions financières, la guerre commerciale du président Donald Trump ayant créé la plus grande incertitude pour le secteur depuis la pandémie de Covid-19. Face au manque de visibilité sur le comportement des consommateurs face à une conjoncture économique potentiellement dégradée, les compagnies aériennes peinent à prévoir précisément leur activité. "Dans le contexte d'incertitude macroéconomique actuel, il est difficile d'établir des prévisions compte tenu des tendances récentes et éphémères en matière de réservations", a déclaré l'entreprise. Alaska Air Group a également retiré mercredi ses prévisions de bénéfices pour 2025, invoquant l'incertitude macroéconomique actuelle. Southwest Airlines va réduire ses capacités au second semestre afin de "s'adapter à une demande plus faible" et de réduire ses coûts. Le groupe a perdu 13 cents par action sur une base ajustée au premier trimestre, contre une perte de 18 cents attendue par le marché, pour des revenus de 6,43 Mds$, en ligne avec le consensus.