Wall Street : montagnes russes, sur des rumeurs de "pause" sur les droits de douane

Wall Street affiche toujours une volatilité extrême ce lundi, après deux jours de carnage boursier jeudi et vendredi. Les indices sont repassés brièvement dans le vert sur des rumeurs - aussitôt démen...

Wall Street affiche toujours une volatilité extrême ce lundi, après deux jours de carnage boursier jeudi et vendredi. Les indices sont repassés brièvement dans le vert sur des rumeurs - aussitôt démenties par la Maison Blanche - de pause concernant les droits de douane. Plusieurs médias ont ainsi cité Kevin Hassett, directeur du conseil économique national, qui aurait affirmé que l'administration Trump considérait une pause de 90 jours dans les tarifs douaniers concernant tous les pays à l'exception de la Chine. CNBC a ensuite indiqué que la Maison Blanche avait qualifié ces rumeurs de pause de "fake news".

Le S&P 500 évolue désormais en hausse de 0,10% à 5.079 pts, très volatil, alors que le DJIA perd 0,13% à 38.266 pts. Le Nasdaq remonte de 1,14% à 15.765 pts...

Sur le Nymex, le baril de brut WTI rend 1,3% à 61,2$, au plus bas de quatre ans. L'once d'or fin cède 1,1% à 3.004$. L'indice dollar avance de 0,2% face à un panier de devises. Le bitcoin corrige à retardement de 5% en 24 heures, de retour à 78.200$ environ, alors que l'Ethereum plonge de 11% sur une journée et le XRP de près de 9%.

Les opérateurs nourrissent l'espoir, après une fin de semaine dernière déjà calamiteuse, marquée par des plongeons notables des indices jeudi et vendredi (pire correction en deux séances depuis les débuts de la crise Covid-19), que le président américain adoucisse un peu son discours. Mais visiblement, l'administration Trump ne se sent pas tellement concernée pour l'instant par le plongeon des marchés financiers, qui n'est pourtant pas sans conséquence pour les plans 401(k) d'épargne retraite par capitalisation des Américains...

La désinvolture plus générale de l'administration, et notamment du Secrétaire au Commerce Howard Lutnick ou du "douanier en chef" Peter Navarro, conseiller au commerce de Trump, n'aura pas manqué de surprendre. Intervenant hier, les deux hommes n'ont absolument pas tenté d'apaiser la situation, bien au contraire, martelant le discours de l'administration à propos de la nécessité de ces droits de douane. Trump a comparé hier ses tarifs douaniers à un médicament, après avoir utilisé la semaine dernière la métaphore du patient qui se remettrait de l'opération. Au retour de son week-end de golf en Floride, le président américain a tout de même assuré ne pas souhaiter que les marchés actions baissent, alors que certains l'accusaient de faire sciemment chuter les marchés pour contraindre la Fed à ajuster sa politique.

Alors que les représailles chinoises annoncées en fin de semaine dernière ont accentué la panique, la réponse européenne semble bien plus douce et pourrait aussi contribuer à sauver la journée à Wall Street. La présidente de la Commission, Ursula Von der Leyen a en effet indiqué que l'UE pourrait proposer aux États-Unis une exemption totale de droits de douane pour les biens industriels, ce qui rappelle grandement la proposition d'Elon Musk. Elle propose donc "un bon accord" à Trump, ce qui contraste avec la riposte chinoise bien plus virulente et pourrait en partie apaiser les marchés, du moins si le président américain saisit la perche tendue.

L'administration Trump affirme par la voix de son Secrétaire au Trésor Scott Bessent que 50 pays ont entamé des pourparlers avec les USA depuis mercredi. Le Secrétaire au Commerce Lutnick a lui indiqué sur CBS que ces mesures resteraient en place "pendant des jours ou des semaines"...

Parmi les réactions notables, Jamie Dimon, patron de JP Morgan, a averti au sujet des turbulences causées par les droits de douane américains, qui pourraient ralentir la croissance de la première économie mondiale, stimuler l'inflation et potentiellement entraîner des conséquences négatives durables. Dans sa lettre annuelle aux actionnaires, publiée ce jour, Dimon s'est donc inquiété des conséquences sur les alliances économiques à long terme des États-Unis. JP Morgan vient de relever d'ailleurs à 60% son évaluation du risque de récession américaine cette année.

Goldman Sachs a pour sa part revu sa probabilité de récession aux États-Unis à 45%, et le DG de la banque Lloyd Blankfein a suggéré sur X que le président américain reporte les droits de douane réciproques de six mois... Le milliardaire et investisseur Bill Ackman en a appelé lui aussi à un report, de 90 jours, des tarifs douaniers.

Stanley Druckenmiller, autre investisseur de renom, a précisé sur X qu'il ne soutenait pas des tarifs commerciaux de plus de 10%... Enfin, Elon Musk, grand soutien de Trump à la tête du DOGE, semble lui aussi dubitatif et suggère par exemple l'idée d'une zone de livre échange avec l'Europe, tentant de sortir par le haut de cette crise sans précédent.

Sur le front économique à Wall Street ce jour, les chiffres du crédit à la consommation sont attendus à 21 heures. Demain mardi, Mary Daly de la Fed interviendra dans la soirée, tandis que mercredi, les opérateurs suivront une prise de parole de Thomas Barkin puis les Minutes de la dernière réunion monétaire de la Fed. Lorie Logan, Alberto Musalem et John Williams de la Fed auront aussi leur mot à dire jeudi et vendredi.

Les chiffres de l'inflation américaine des prix à la consommation de mars seront dévoilés jeudi à 14h30 (consensus +0,1% d'un mois sur l'autre et +2,6% sur un an, ou +0,3% et +3% hors alimentaire et énergie). L'indice des prix à la production de mars sera dévoilé vendredi à 14h30 (consensus +0,2% par rapport à février, ou +0,3% hors éléments volatils).

Donald Trump remet par ailleurs la pression sur la Fed pour qu'elle réduise les taux ! "Les prix du pétrole sont en baisse, les taux d'intérêt sont en baisse (la Fed, qui réagit lentement, devrait baisser ses taux !), les prix alimentaires sont en baisse, il n'y a pas d'inflation, et les États-Unis, longtemps malmenés, encaissent via les droits de douane déjà en vigueur des milliards de dollars par semaine des pays qui ont abusé. Et ce, malgré le fait que le plus grand abuseur de tous, la Chine, dont les marchés s'effondrent, vient d'augmenter ses droits de douane de 34%, en plus de ses droits de douane ridiculement élevés à long terme (et plus !), sans tenir compte de mon avertissement aux pays maltraitants de ne pas riposter. Ils en ont fait assez, pendant des décennies, en profitant des bons vieux États-Unis ! Nos anciens "dirigeants" sont à blâmer pour avoir permis que cela, et tant d'autres choses, arrive à notre pays. REDONNONS À L'AMÉRIQUE SA GRANDEUR !", a donc asséné Trump sur Truth Social.

"Ce serait le moment idéal pour le président de la Fed, Jerome Powell, de baisser les taux d'intérêt. Il est toujours en retard, mais il pourrait désormais changer d'image, et vite. Les prix de l'énergie sont en baisse, les taux d'intérêt sont en baisse, l'inflation est en baisse, même les prix des oeufs ont chuté de 69% et l'emploi est en hausse, tout cela en deux mois. UNE GRANDE VICTOIRE pour l'Amérique. BAISSEZ LES TAUX D'INTÉRÊT, JEROME, ET ARRÊTEZ DE FAIRE DE LA POLITIQUE !", avait lancé déjà le président américain en fin de semaine dernière, tandis que Jerome Powell maintient quant à lui pour l'heure sa posture très prudente, attendant sans doute et fort logiquement d'en savoir plus sur l'issue finale des discussions commerciales et leurs répercussions sur l'économie et l'inflation.

"Les États-Unis ont l'occasion de faire ce qui aurait dû être fait il y a des décennies. Ne soyez pas faibles ! Ne soyez pas stupides ! Ne soyez pas paniqués (un nouveau parti basé sur des gens faibles et stupides !). Soyez forts, courageux et patients, et la grandeur en sera le résultat !", a encore lancé Trump sur Truth Social.

"Des pays du monde entier nous contactent. Des conditions strictes, mais équitables, sont en train d'être fixées. J'ai parlé au Premier ministre japonais ce matin. Il envoie une équipe de haut niveau pour négocier ! Ils ont très mal traité les États-Unis sur le plan commercial. Ils ne prennent pas nos voitures, mais nous prenons des millions des leurs. Il en va de même pour l'agriculture et bien d'autres choses. Tout doit changer, surtout avec la Chine !", a aussi expliqué le président américain.

Les anticipations de baisse des taux de la Fed sont fortement remontées bien évidemment ces derniers jours. D'abord, pour la prochaine réunion des 6 et 7 mai, un geste d'un quart de point est maintenant très envisageable, avec une probabilité de 35% selon l'outil CME FedWatch - qui donnait auparavant pour presque sûr un statu quo. Le même outil montre une probabilité de 28% d'une fourchette de 3,5 à 3,75% sur les taux en fin d'année, soit une baisse de 75 points de base. La probabilité d'un assouplissement de 100 points de base est de 36,4%... Notons que le rendement du T-Bond à 10 ans est revenu pour sa part sur les 4% sur les marchés obligataires, ce qui semble réjouir au plus haut point l'administration Trump, qui se raccroche à cet argument et à la chute bienvenue des cours du brut.

Dans l'actualité des entreprises à Wall Street cette semaine, RPM International ou Cal-Maine Foods publient demain, Constellation Brands, Delta Air Lines et PriceSmart mercredi, CarMax ou Walgreens Boots Alliance jeudi. La saison des résultats financiers trimestriels débute quant à elle vendredi avec de grands établissements financiers tels que JP Morgan Chase, Wells Fargo, BlackRock et Bank of New York Mellon.

Notons que les valeurs Nike (espoirs d'accord douanier avec le Vietnam), GameStop (valeur bitcoin et meme stock) et Strategy (valeur BTC), qui avaient servi de refuges désespérés vendredi à Wall Street, évoluent de manière plus erratique ce jour, à respectivement -3,4%, +2% et -4,7%.

Du côté des 'Mag 7', performances très volatiles également. Apple cède encore 2,3% du fait de son exposition à la Chine. Nvidia remonte de 3,2%. Microsoft grappille 0,2% et Alphabet prend 1,8%, tandis que Meta avance de 2,7%. Amazon gagne 2,8%. Tesla régresse de 2,9%.

Société(s) citée(s) :
Société(s) citée(s) :