Wall Street a encore résisté mercredi, le S&P 500 terminant stable à 5.970 pts, le Dow Jones reculant de 0,22% à 42.427 pts, tandis que le Nasdaq est monté de 0,32% à 19.460 pts, malgré l'incertitude commerciale persistante et des chiffres en berne de l'emploi privé américain... Donald Trump a évoqué des négociations "très difficiles" avec Xi Jinping, alors que Washington et Pékin s'accusent mutuellement de ne pas avoir respecté leur accord commercial, tandis que dans le même temps, l'UE s'élève contre le doublement des droits de douane US sur l'acier et l'aluminium qui vient de prendre effet... En outre, sur le front économique, les chiffres de l'emploi privé d'ADP ont déçu mercredi, ce qui incite à la prudence à deux jours du rapport gouvernemental mensuel sur la situation de l'emploi...
Les créations de postes non-agricoles aux États-Unis pour le mois de mai 2025 sont ainsi ressorties au nombre de 37.000 seulement selon le rapport d'ADP ce jour, contre un consensus FactSet de 130.000 et une lecture de 60.000 un mois auparavant, en lecture révisée. Le rythme des embauches est ressorti ainsi au plus bas depuis mars 2023. "Après un bon début d'année, les embauches s'essoufflent. La croissance des salaires, en revanche, est restée stable en mai, se maintenant à des niveaux soutenus tant pour les personnes ayant conservé leur emploi que pour celles ayant changé d'emploi", note Nela Richardson, la cheffe économiste d'ADP. Seules les entreprises de 50 à 249 personnes ont généré des emplois, 51.000 au total, au mois de mai. Les créations de postes ont surtout concerné les activités financières (20.000 emplois), l'information (8.000), ainsi que les loisirs et l'hospitalité (38.000).
Donald Trump a sauté sur l'occasion de cette publication pour rappeler au patron de la Fed la nécessité de baisser les taux : "LES CHIFFRES D'ADP SONT SORTIS ! 'Too Late' Powell doit maintenant BAISSER LE TAUX. Il est incroyable ! L'Europe les a baissés NEUF FOIS !", a ainsi lancé le président américain sur Truth Social.
L'indice PMI composite américain final du mois de mai 2025 s'est établi à 53, contre un consensus de 52,1 et une lecture flash de 52,1 également. L'indice des services est ressorti à 53,7 contre 52,3 en lecture préliminaire. Deux indicateurs qui signalent donc une nette expansion de l'activité américaine en mai.
L'indice ISM des services américains pour le mois de mai 2025 s'est affiché à 49,9, contre 52,2 de consensus FactSet et 51,6 un mois avant. L'indice des commandes nouvelles a corrigé à 46,4 contre 52,3 en avril. L'indice contredit quelque peu l'indicateur PMI des services publié plus tôt dans la journée.
Donald Trump a donc comme prévu signé le décret doublant le niveau des droits de douane sur l'acier et l'aluminium à 50% contre 25%... Le président américain a présenté cette mesure comme nécessaire pour protéger la sécurité nationale. Le décret signé mardi indiquait que la précédente imposition n'avait pas encore permis aux industries nationales de développer et de maintenir les taux d'utilisation des capacités de production nécessaires à leur bonne santé et aux besoins prévisionnels de la défense nationale, détaille Bloomberg. "L'augmentation des droits de douane précédemment imposés apportera un soutien accru à ces industries et réduira, voire éliminera, la menace pour la sécurité nationale que représentent les importations d'articles en acier et en aluminium et de leurs dérivés", selon le décret publié par la Maison Blanche.
Cette dernière taxe attise les tensions commerciales alors que les États-Unis sont engagés dans des négociations avec de nombreux partenaires commerciaux sur ses droits dits réciproques avant l'échéance du 9 juillet, note Bloomberg. La capacité du président à imposer unilatéralement des droits de douane repose également sur un fondement juridique plus fragile, après qu'un tribunal fédéral a annulé la semaine dernière nombre de ses autres mesures mises en place en vertu d'une loi d'urgence, rappelle l'agence. Les taxes sur les métaux n'étaient toutefois pas soumises à cette décision. Les droits de douane sur les métaux importés du Royaume-Uni resteront au taux précédent de 25% afin de permettre aux deux pays de travailler sur de nouvelles taxes ou quotas d'ici le 9 juillet, selon le décret. Le Mexique entend aussi demander une exemption face à une hausse jugée insoutenable...
Donald Trump avait annoncé cette décision d'augmenter les tarifs douaniers sur l'acier lors d'un discours prononcé vendredi dernier dans une usine US Steel en Pennsylvanie, où il a approuvé la vente de l'entreprise à la société japonaise Nippon Steel tout en promettant qu'elle resterait sous une forme ou une autre de contrôle américain. Les nouveaux droits de douane, qui s'appliquent donc à tous les partenaires commerciaux des USA hors Royaume-Uni, sont entrés en vigueur ce mercredi.
Donald Trump a avoué par ailleurs sa difficulté à conclure un accord avec son homologue chinois. Il a indiqué sur Truth Social qu'il était en effet difficile de négocier avec Xi Jinping. "J'apprécie le président XI de la Chine, je l'ai toujours aimé et je l'aimerai toujours, mais il est TRÈS DUR ET EXTRÊMEMENT DIFFICILE DE CONCLURE UN ACCORD AVEC LUI !!!", a donc lancé le président américain. Une déclaration de Trump qui fait suite à une série de rebondissements sur le front commercial entre les États-Unis et la Chine, qui affirment chacun que l'autre a enfreint l'accord commercial provisoire actuellement en vigueur. Depuis l'accord du 12 mai à Genève, les deux pays ont convenu d'une trêve de 90 jours dans la guerre commerciale. Trump et Xi devraient s'entretenir directement plus tard dans la semaine, selon la porte-parole de la Maison Blanche, Karoline Leavitt, qui confirme des propos antérieurs de Kevin Hassett, le Président du Conseil économique national américain.
Du côté de la Fed, le débat prend forme au sujet de la probable future baisse des taux... Le gouverneur de la Réserve fédérale Christopher Waller a déclaré cette semaine qu'il continuait d'entrevoir une baisse des taux d'intérêt plus tard cette année, alors qu'il anticipe une hausse du chômage et une augmentation temporaire de l'inflation due aux droits de douane. Lorie Logan, patronne de la Fed de Dallas, a estimé quant à elle que malgré l'incertitude, l'économie globale faisait preuve de résilience. Elle juge la politique monétaire bien positionnée pour attendre et incite à la patience. Le président de la Fed de Chicago Austan Goolsbee a laissé entendre que la Fed pourrait assouplir sa politique une fois levée l'incertitude sur les droits de douane. Jerome Powell, président de la Fed, a aussi pris la parole à l'occasion des remarques d'ouverture de la conférence du 75e anniversaire de la Division des finances internationales du Conseil de la Réserve fédérale à Washington, mais n'a pas évoqué explicitement les futurs mouvements monétaires.
Le président de la Fed d'Atlanta, Raphael Bostic, a déclaré qu'une économie forte donnait à la banque centrale le temps d'évaluer l'impact des droits de douane sur l'inflation et la croissance. "Je continue de penser que la patience est la meilleure approche en matière de politique monétaire", a déclaré Bostic. Dans une économie jugée globalement saine, le responsable estime que la Fed a la possibilité d'attendre et de voir comment l'incertitude accrue affecte l'emploi et les prix. S'adressant aux journalistes, Bostic a indiqué que, dans les prévisions de la Fed publiées en mars, il avait envisagé une baisse unique des taux pour cette année. "Je pense toujours qu'il y a une marge de manoeuvre pour cela, et cela dépendra en grande partie de la manière dont l'incertitude se résorbera", résume Bostic, qui reste toutefois prudent à propos de l'inflation, supérieure à l'objectif des 2%. Il juge difficile de dire si la Fed réduirait ses taux immédiatement si toute l'incertitude commerciale était écartée.
Jeudi, les investisseurs suivront la dernière étude Challenger sur les annonces de licenciements aux USA, la balance du commerce international des biens et services, les inscriptions hebdomadaires au chômage pour la semaine close le 31 mai (consensus 227.500), ainsi que les chiffres de la productivité non-agricole final du premier trimestre (consensus au rythme de -0,8%, +5,7% pour les coûts unitaires du travail).
Enfin, vendredi se tiendra le rendez-vous économique majeur de la semaine avec le rapport mensuel gouvernemental sur la situation de l'emploi pour le mois de mai (14h30, consensus 130.000 créations de postes non-agricoles dont 120.000 dans le privé, 4,2% de taux de chômage, +0,3% pour le salaire horaire moyen d'un mois sur l'autre).
Dans l'actualité des entreprises cotées à Wall Street, Broadcom, Lululemon, Samsara, Rubrik, DocuSign, Brown Forman, Ciena et Victoria's Secret annonceront leurs comptes jeudi...
Sur le Nymex, le baril de brut WTI revient sous les 63$. L'once d'or fin pointe à 3.371$. L'indice dollar cède 0,4% face à un panier de devises de référence. Sur les marchés obligataires, le rendement du T-Bond à 10 ans se tasse à 4,37% contre 4,90% sur le '30 ans'.
Les valeurs
CrowdStrike (-5,7%), le groupe américain de cybersécurité qui avait décroché en bourse l'été dernier suite à une mise à jour logicielle défectueuse ayant provoqué une panne informatique mondiale, avant de rejoindre des sommets historiques ce mois à Wall Street, perd du terrain. Le groupe a publié pour son premier trimestre fiscal un bénéfice ajusté par action de 73 cents à comparer à un consensus de 66 cents. Les revenus, de 1,1 milliard de dollars, ont été conformes aux attentes. Les prévisions du deuxième trimestre sont prudentes, CrowdStrike envisageant des revenus allant de 1,14 à 1,15 milliard de dollars, à comparer à un consensus de 1,16 milliard. Le groupe texan d'Austin prévoit pour l'exercice un bpa allant de 3,44 à 3,56$, pour des revenus allant de 4,74 à 4,81 milliards de dollars.
Hewlett Packard Enterprise (+0,8%) a dépassé les attentes de marché pour son deuxième trimestre fiscal et livré des prévisions de revenus solides pour le troisième trimestre de l'exercice. Sur le trimestre clos fin avril, les revenus ont augmenté de 6% à 7,6 milliards de dollars, alors que le bénéfice ajusté par action a reculé de 10% à 38 cents. Le groupe visait un bpa ajusté de 28 à 34 cents sur cette période. Les revenus de serveurs ont augmenté de 6% à 4,1 milliards de dollars... Pour son troisième trimestre, le groupe prévoit des revenus de 8,2 à 8,5 milliards, ainsi qu'un bpa ajusté allant de 40 à 45 cents. Sur l'exercice, la croissance des revenus est attendue entre 7 et 9%, alors que le bpa ajusté est anticipé entre 1,78 et 1,90$.
Guidewire (+16,4%), éditeur américain de logiciels et solutions cloud pour l'assurance IARD, grimpe à Wall Street. Pour son troisième trimestre fiscal, le groupe a dégagé un bénéfice ajusté par action de 88 cents, très largement au-dessus du consensus des analystes et trois fois plus élevé que l'an dernier. Les revenus trimestriels ont atteint 294 millions de dollars, dépassant également les attentes, contre 241 millions de dollars sur le trimestre comparable de l'an dernier. Le groupe californien envisage pour le trimestre clos en juillet des revenus de 332 à 340 millions de dollars. Les revenus de l'exercice sont ainsi anticipés entre 1,18 et 1,19 milliard.
Dollar Tree (-8,3%), le détaillant discount américain a annoncé pour son premier trimestre fiscal un bénéfice net de 343 millions de dollars, ainsi qu'un bénéfice ajusté par action de 1,26$ à comparer à un consensus de 1,19$. Les revenus ont été de 4,64 milliards de dollars, également meilleurs que prévu puisque le consensus était de 4,5 milliards. Le groupe table désormais pour l'exercice sur un bénéfice ajusté par action allant de 5,15 à 5,65$, tandis que les revenus sont anticipés entre 18,5 et 19,1 milliards de dollars. Dollar Tree, qui cède pour 1 milliard de dollars à un groupe d'investisseurs son activité moins rentable Family Dollar, prévoit pour le deuxième trimestre un bénéfice ajusté en déclin jusqu'à 50%, avec la volatilité due aux tarifs douaniers, mais il juge que les résultats devraient accélérer au deuxième semestre.
Tesla (-3,5%) alors que ses ventes de véhicules électriques fabriqués en Chine ont reculé pour un huitième mois consécutif en mai, avec la concurrence accrue et la guerre des prix. Les livraisons de véhicules Model 3 et Model Y fabriqués en Chine, incluant les ventes intérieures et les exportations vers l'Europe et d'autres marchés, ont ainsi chuté de 15% en mai par rapport à l'année précédente, à 61.662 véhicules selon les données de l'Association chinoise des voitures particulières CPCA.
Apple (-0,2%) résiste à Wall Street, alors que le groupe à la pomme est victime d'une dégradation de Needham, qui évoque les risques liés à l'IA et un cycle limité de mise à jour des iPhones. Le broker note que Wall Street s'inquiète toujours des perspectives de croissance du groupe de Cupertino et de sa position sur le segment de l'intelligence artificielle. La recommandation est ainsi ramenée à 'conserver', contre 'achat' auparavant.
Parmi les 'Mag 7', Nvidia (+0,5%) et Microsoft (+0,2%) sont désormais dans un mouchoir de poche pour la place de première capitalisation boursière mondiale, à environ 3.400 milliards de dollars...