Vote sans suspense au Sénat pour le budget de Bayrou, toujours sous pression

Plus de trois mois après son dépôt au Parlement, le projet de budget de l'Etat pour 2025 est enfin soumis au vote du Sénat, jeudi, un scrutin sans suspense pour un gouvernement qui cherche encore à né...

Plus de trois mois après son dépôt au Parlement, le projet de budget de l'Etat pour 2025 est enfin soumis au vote du Sénat, jeudi, un scrutin sans suspense pour un gouvernement qui cherche encore à négocier sa survie avec les socialistes, très remontés.

Initié par Michel Barnier au mois d'octobre, rejeté par l'Assemblée nationale en première lecture, suspendu après la censure de l'ex-Premier ministre et finalement repris par François Bayrou, ce projet de loi de finances (PLF) a connu un parcours chaotique au Parlement...

Crucial pour l'Etat qui tourne actuellement au ralenti sous le régime exceptionnel d'une loi spéciale votée en fin d'année, le budget représente une équation quasi-insoluble pour l'exécutif, privé de majorité absolue à l'Assemblée nationale mais sommé par Bruxelles de redresser les finances publiques.

"C'est un exercice extrêmement difficile, très exigeant, mais qui est obligatoire. Une France sans budget, c'est une France à l'arrêt et qui creuse en plus son déficit", a martelé mercredi la porte-parole du gouvernement, Sophie Primas, jugeant "impératif" que le texte puisse être promulgué avant la fin février.

Mais l'opposition de la gauche reste très vive: si le Parti socialiste n'a pas voté la première motion de censure visant le Premier ministre François Bayrou, il s'apprête à voter contre le budget comme la totalité de la gauche.

- Pas de "clémence automatique" -

C'est "un budget d'austérité qui cherche dans les poches de ceux qui n'ont pas créé le problème", a lancé le chef de file des sénateurs socialistes sur le budget, Thierry Cozic, en ouverture des débats.

"Ne pensez pas que notre clémence se fera automatiquement", a-t-il ajouté à l'attention du ministre de l'Economie Eric Lombard, l'appelant à faire de nouvelles concessions pour résister à la censure.

Un peu plus tôt, le locataire de Bercy avait déjà fait passer un message d'alerte, devant les acteurs économiques: "Le coût d'une censure est plus élevé encore" que celui des concessions accordées au PS, comme la renégociation de la réforme des retraites ou le renoncement aux suppressions de 4.000 postes d'enseignants, a-t-il prévenu.

Sa tâche est périlleuse, car l'exécutif vise un effort massif de 32 milliards d'économies et 21 milliards de recettes pour ramener le déficit public à 5,4% du PIB en 2025, contre un niveau attendu entre 6 et 6,1% pour 2024.

Pour arriver à ses fins, le gouvernement peut compter sur un Sénat globalement bienveillant. Dominée par une alliance droite-centristes qui le soutient et privilégie elle aussi une logique de réduction des dépenses, la chambre haute devrait adopter très largement le texte.

"Ce n'est ni le budget de Gabriel Attal, ni celui de Michel Barnier, ni celui de François Bayrou, c'est le budget du Sénat, un budget responsable", qui marque "le début d'un long chemin vers le redressement de nos finances publiques", a affirmé la cheffe de file du groupe LR sur le projet de loi de finances, Christine Lavarde.

- Nouvelles concessions ? -

Pour le gouvernement, le plus dur commence, avec la convocation le 30 janvier d'une commission mixte paritaire (CMP), réunion de sept sénateurs et sept députés chargés d'aboutir à un texte de compromis. Sans doute l'une des derniers occasions d'intégrer des concessions à la copie.

La version commune devra passer le filtre de l'Assemblée nationale dans la semaine du 3 février pour un ultime vote, ou l'utilisation possible du 49.3, sans doute suivie d'une nouvelle motion de censure.

"La CMP sera le juge de paix. D'ici au 30 janvier, il y a la possibilité de faire bouger les lignes", assume auprès de l'AFP le président des sénateurs PS Patrick Kanner.

Mais le PS est aussi mis sous pression par ses partenaires: les Insoumis estiment que le parti à la rose "romprait définitivement" avec le Nouveau Front populaire s'il ne votait pas la censure sur le budget.

Particulièrement ciblées par la gauche: les multiples coupes budgétaires supplémentaires ajoutées ces derniers jours par le gouvernement Bayrou. Des centaines de millions d'euros en moins pour l'écologie, le logement, l'aide au développement ou le sport...

"On va voter la censure et on va le faire savoir très fortement", a menacé la patronne des Ecologistes Marine Tondelier, "en colère" face au "sacrifice de l'écologie".

© 2025 AFP

Les sénateurs réunis pour examiner le projet de budget de l'Etat, le 23 janvier 2025, au Sénat à Paris
Le Premier ministre François Bayrou à l'Assemblée nationale le 22 janvier 2025
Les sénateurs réunis pour examiner le projet de budget de l'Etat, le 23 janvier 2025, au Sénat à Paris
Le ministre de l'Economie Eric Lombard au Sénat, à Paris, le 23 janvier 2025