Marchés : la domination financière des États-Unis est remise en cause

Qu'un début ? La grande rotation et le moindre intérêt des investisseurs mondiaux pour les actifs américains se poursuivra pendant des années si le président Donald Trump persiste dans sa politique co...

Qu'un début ? La grande rotation et le moindre intérêt des investisseurs mondiaux pour les actifs américains se poursuivra pendant des années si le président Donald Trump persiste dans sa politique commerciale, selon Alain Bokobza. Le directeur de l'allocation d'actifs de la Société Générale explique à 'Bloomberg' : "en septembre, nous avons indiqué à nos clients que les valorisations aux États-Unis étaient préoccupantes et que les élections américaines pourraient ouvrir la voie à un scénario moins optimiste... La nouvelle administration à Washington a créé un niveau d'incertitude très élevé. Cette grande rotation ne fait que commencer et pourrait durer des années".

Les actions américaines ont sous-performé leurs homologues mondiales cette année, dans un contexte de craintes que la politique commerciale et les droits de douane américains nuisent à la croissance économique et contribuent à alimenter l'inflation. Le stratège note que, pendant des années, les États-Unis étaient le seul pays où les investisseurs pouvaient trouver de la croissance et que leurs marchés boursiers étaient valorisés à la perfection, avec une forte concentration d'actions technologiques. Mais ces entreprises souffrent aujourd'hui des droits de douane. Le dollar est surévalué depuis un certain temps et le retournement de tendance pourrait se poursuivre, selon lui. "Lors des périodes d'aversion au risque des 20 à 30 dernières années, le dollar a progressé, car il a toujours constitué une valeur refuge. Je n'ai pas constaté cela ici... La prime de risque appliquée à tous les actifs américains est en hausse, ce qui marque la fin de cet exceptionalisme".

A.Bokobza ne s'attend par ailleurs pas à une intervention prochaine de la Réserve fédérale, soulignant que la Banque centrale est dans une position difficile. Il est peu probable qu'elle intervienne avant juin, une fois que l'impact des tarifs douaniers sur la croissance économique et l'inflation sera visible, selon le spécialiste. Le stratège constate également un regain de demande de la part des clients internationaux pour les actions européennes. Les portefeuilles étaient tellement concentrés sur les actifs américains que les investisseurs ont oublié qu'il existait également d'excellentes entreprises moins chères en Europe, au Japon et en Chine, déclare A.Bokobza. "Le protectionnisme ne fait pas de gagnant et l'administration américaine peine à prouver que sa politique est bénéfique pour le pays", souligne le spécialiste, ajoutant que certains actifs souffriront plus que d'autres. "Si les actions européennes ont surperformé et que l'euro a progressé malgré la baisse des taux d'intérêt, cela signifie qu'il se passe quelque chose en Europe".

L'agence note que le stratège s'est montré optimiste sur les actifs américains pendant un an, jusqu'en septembre 2024, lorsqu'il a mis en garde contre l'apparition de failles. Il a réitéré cet appel en février, conseillant alors aux investisseurs de réduire leur exposition aux actions américaines et au dollar. Le S&P 500 a chuté de 15% depuis, tandis que l'indice du dollar a reculé de près de 9%.