La dévaluation brutale du peso argentin a été saluée par les cambistes, mais la persistance d'un décalage avec le cours informel et l'encadrement de la devise leur laissent un goût d'inachevé.
Sur décision du gouvernement du nouveau président ultralibéral argentin, Javier Milei, la valeur de la monnaie argentine a été divisée par plus de deux, le 13 décembre, passant de 366 pesos pour un dollar environ à 800.
Cette dévaluation s'inscrit dans le cadre de la thérapie de choc que le nouveau chef de l'Etat veut appliquer à l'économie de son pays, où l'inflation a atteint 160,9% sur un an en novembre.
"La dévaluation était une étape nécessaire", selon William Jackson, analyste de Capital Economics. "Cela rapproche la devise de son vrai niveau, ce qui rend l'économie argentine beaucoup plus compétitive."
Dans un premier temps, ce réalignement de la devise devrait engendrer davantage d'inflation, la baisse de valeur du peso faisant mécaniquement monter les prix des biens et services dans le pays.
Dans un second temps, elle doit stabiliser la monnaie, qui n'avait cessé de déraper ces six dernières années, et contribuer à calmer les prix.
"Mais l'offensive contre l'inflation tient surtout à la capacité de la banque centrale (BCRA) de remonter ses taux et du gouvernement à réduire ses dépenses", explique William Jackson.
Or, la BCRA a pris le marché à contrepied, lundi, en décidant de changer le taux qu'elle considère comme référence de sa politique monétaire.
Le taux principal ne sera plus celui des obligations à un mois, les Leliq, mais celui des prêts à un jour aux institutions financières.
Au passage, l'opération revient à abaisser le taux directeur de 133% à 100%, alors que les opérateurs attendaient un durcissement.
Autre sujet de préoccupation des cambistes, "le nouveau taux de change est encore loin du cours informel", a rappelé Win Thin, analyste de Brown Brothers Harriman.
Mardi, il évoluait ainsi autour de 970 pesos pour un dollar.
Dévaluer insuffisamment et plafonner artificiellement ensuite l'évolution mensuelle du peso à 2%, comme l'a fait le gouvernement argentin, "ne semble pas être la recette du succès", considère Win Thin.
Depuis la dévaluation, la devise argentine a ainsi très peu évolué. Elle valait, mardi, 802,62 pesos pour un dollar.
"Ils pourraient rapidement perdre, de nouveau, de la compétitivité" en empêchant les cours officiel et informel de se rapprocher librement, prévient William Jackson. "S'ils ne laissent pas le peso flotter, ils pourraient se trouver obligés de dévaluer de nouveau", avertit-il.
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