Leur but est de préparer le groupe "pour la cinquième génération": Joy et Alexandre Barrière tournent la page d'un épisode mouvementé au terme duquel ils ont pris les rênes du premier casinotier de France à la suite de leur père Dominique Desseigne.
"Ce que nous voulons, c'est nous inscrire dans le sillon tracé par les trois générations d'entrepreneurs et de bâtisseurs qui nous ont précédés, en étant dignes d'eux et en particulier de notre mère. Et faire en sorte que le groupe continue d'exister pour la cinquième génération et qu'il retrouve le chemin de la croissance", explique Alexandre Barrière, 36 ans, à l'AFP.
Le groupe familial, fondé en 1912, compte notamment 32 casinos, 19 hôtels de luxe et plus de 150 restaurants et bars, dont le Fouquet's sur les Champs-Elysées, pour 1,3 milliard d'euros de chiffre d'affaires au total.
Au terme d'une longue bataille avec leur père relayée dans la presse ces derniers mois, les enfants de Dominique Desseigne, 79 ans, et de Diane Barrière, héritière du groupe décédée en 2001, ont repris les rênes en avril 2023 et racheté 100% des parts du groupe Lucien Barrière cet été.
"Un des axes qui nous tient à coeur, c'est rester proche du terrain", indique Joy Desseigne-Barrière, 33 ans, qui a commencé sa carrière à Londres avant de rejoindre le groupe où elle a commencé par une "immersion" au casino de La Rochelle.
Depuis leur nomination, les jeunes dirigeants enchaînent les visites sur sites à la rencontre des près de 7.000 employés du groupe, dont certains ont connu "leur mère et leur grand-père", ce qui "renforce leur sentiment de responsabilité", selon Alexandre.
"On a peut-être un rôle différent au sein de l'entreprise, mais on n'a pas changé et on ne veut pas que nos rapports de proximité changent", confie-t-il, "il ne faut pas oublier que "+sur le plus beau trône du monde on n'est jamais assis que sur son cul+".
Parmi leur priorité, accélérer l'internationalisation "en privilégiant la qualité à la quantité" notamment au Moyen-Orient, où ils sont implantés à Dubai et Abou Dhabi avec des brasseries Fouquet's. "Pour l'anecdote, Tom Cruise est resté un jour de plus parce qu'il voulait absolument remanger les hamburgers du Fouquet's" d'Abou Dhabi, assure-t-il.
Autre priorité: le numérique, avec notamment le lancement en test d'une application "qui permet aux clients de rentrer dans un casino, de suivre l'actualité et de payer", explique sa soeur, qui s'est spécialisée dans les données.
"Grâce à la data qu'on collecte, on va pouvoir faire plus de prédiction et mieux cerner les modèles (de machines à sous) qui fonctionnent" afin de "faire des investissements plus ciblés".
Sachant que l'achat de machines à sous peut représenter jusqu'à 20 millions d'euros par an. Le groupe doit également investir dans la rénovation de ses établissements, dont il est propriétaire.
- "Rien n'est à vendre" -
Côté finances, "on est confiants pour l'avenir", indique le dirigeant, assurant que l'endettement du groupe est "tout à fait raisonnable".
Occasion pour lui de rappeler que "rien n'est à vendre": "on a reçu des offres complètement surréalistes" mais "on ne vend pas son âme".
"On était précurseurs et maintenant c'est à nous de rattraper le retard. Le modèle du resort était à Deauville bien avant d'être à Las Vegas, c'est ça qui fait notre force", estime-t-il.
L'objectif est désormais une "montée en gamme côté hôtellerie et l'amélioration de l'expérience client côté casinos", résume Joy.
Ils se disent contre la légalisation de l'offre de casino en ligne en France : "si ça doit ouvrir, c'est selon le modèle JADE", un dispositif expérimental où le casino virtuel est un double du casino réel, estime Alexandre.
"Le casino, ce n'est pas que du jeu, c'est aussi une expérience. C'est du temps de loisir que l'on met à disposition", détaille Joy, précisant que la filière casino emploie environ 20.?000 intermittents du spectacle par an en France.
Ils offrent des "temps de pause" pour les joueurs qui permettent de rendre l'offre sur place "moins addictogène" que l'offre en ligne.
© 2023 AFP