Après des années de hausse chronique, l'inflation en Argentine poursuit sa tendance à la baisse pour s'établir à 2,2% en janvier, plus bas indice mensuel depuis mi-2020, après 13 mois d'austérité et toujours un tribut social, sous la présidence ultralibérale de Javier Milei.
La hausse des prix sur janvier, publiée jeudi par l'Institut national de la statistique (Indec), confirme la pente des derniers mois et atteint en interannuel 84,5%, passant pour la première fois sous la barre des 100% depuis deux ans, soit janvier 2023 (98,8% alors).
L'indice de janvier est le plus faible depuis les 1,9% de juillet 2020. Même si à 84,5% sur douze mois, l'inflation argentine reste parmi les plus élevées au monde, son affaiblissement représente en un peu plus d'un an un revirement macro-économique spectaculaire pour la 3e économie d'Amérique latine. Fin 2023, elle atteignant 211,4%, et 117,8% fin 2024.
"Le processus de désinflation continue", s'est félicité le ministre de l'Economie Luis Caputo sur son compte X. Il salue "l'inflation la plus basse depuis le début de la présidence de Javier Milei", grâce "depuis le début à un processus de stabilisation et de désinflation basé sur trois piliers: budgétaire, monétaire et de change".
"On continue d'écrire l'histoire", a claironné Javier Milei peu après sur Instagram. "Saluez l'inflation alors qu'elle s'en va !", a ironisé son parti La Libertad Avanza, sur X.
- "Tenir, voir où ça nous mène" -
En un an de gouvernement, le président ultralibéral a reconquis un équilibre budgétaire au prix d'un "ajustement choc", d'une forte dévaluation de plus de 50% du peso dès ses premiers jours de présidence, de coupes claires dans les dépenses publiques, et d'un assèchement de l'émission monétaire.
Pour la première fois depuis 2020, l'Argentine a clôturé l'année 2024 avec un excédent des comptes publics.
Après un pic en décembre 2023 (+25,5%) sous le choc de la dévaluation initiale, l'inflation mensuelle a entamé une décélération graduelle mais constante, pour se maintenir constamment en dessous de 3% depuis octobre.
Victimes collatérales de l'austérité: pouvoir d'achat, emploi, et activité économique, qui ont enlisé le pays dans la récession (-2,1% sur an au 3e trimestre), laquelle donnait toutefois des signes de ralentissement ces derniers mois.
L'emploi a ainsi vu la disparition d'environ 185.000 postes sur près d'un an à fin novembre, selon les dernières données du secrétariat du Travail. Dont 51.000 postes dans le secteur public, première cible d'un président qui assume "haïr l'Etat".
Une saignée qui de fait ne donne qu'une image partielle de l'impact sur l'emploi dans son ensemble, dans un pays où le secteur informel représentait en 2024 plus de 40%.
La pauvreté, amplifiée sous l'impact du choc initial de la dévaluation et des pertes d'emploi, a bondi à plus de 52% au premier trimestre 2024, a rebaissé depuis dans des proportions controversées, entre le gouvernement qui parle d'un taux de pauvreté de moins de 40%, et observatoires sociaux, qui évoquent un taux un peu au-dessous de 50%.
Résultat, malgré les indicateurs macro-économiques en regain, les fins de mois restent aussi difficiles pour grand nombre d'Argentins, entre emplois perdus, tarissement des subventions à l'énergie, au transport et retraites rognées.
"On ne peut rien acheter, on ne peut pas acheter de viande", constate auprès de l'AFP Miguel Baldazarra, retraité de 75 ans, illustrant une consommation de viande en forte baisse (-9% sur l'année 2024).
Pour autant, les sondages montrent un appui continu à Javier Milei, avec un baromètre d'approbation autour de 45% voire 50% pour certains. Et sur fond de désinflation, une inclination à "tenir le plus longtemps possible, voir jusqu'où on peut aller, où ça nous mène", dit à l'AFP Kevin Gonzalez, vendeur de fruits et légumes de 27 ans.
Tenir, par exemple, jusqu'à une éventuelle reprise que gouvernement et organismes tels le FMI promettent à l'Argentine pour 2025 avec +5% de croissance.
© 2025 AFP