Worldline : victime d'une campagne médiatique orchestrée ?...

Worldline : victime d'une campagne médiatique orchestrée ?

Pierre-Antoine Vacheron, à la tête de Worldline depuis le mois de mars, n'avait sans doute pas imaginé une telle séance pour son groupe. Après de multiples déconvenues et avertissements sur résultats, la société de paiements s'est effondrée de près de 40% mercredi à Paris, cette fois mise en cause par l'enquête journalistique "Dirty Payments", coordonnée par le réseau European Investigative Collaborations. Au plus bas historique, l'action a perdu plus de 95% de sa valeur depuis ses sommets de 2021.

Lors d'une conférence téléphonique tenue hier soir avec des analystes et certains médias, le dirigeant a déclaré que Worldline avait été " attaqué " par la presse et qu'il n'y avait " rien de nouveau " dans ces articles. La seule nouveauté réside dans le " récit inacceptable ", a ajouté le DG cité par 'Bloomberg'. Selon l'enquête, Worldline aurait ignoré les avertissements et continué à traiter avec des clients interdits et d'autres clients à haut risque ces dernières années, permettant ainsi la poursuite de certaines transactions frauduleuses.

Malgré les mesures prises pour assainir sa clientèle, le journal néerlandais 'NRC' a rapporté que Worldline n'avait pas banni ces " dernières années " les clients lucratifs présentant des taux de fraude élevés, alors même que son service de gestion des risques réclamait des contrôles plus stricts. Le magazine allemand 'Spiegel' a lui indiqué que Payone, basé à Francfort et détenu majoritairement par Wordline, n'avait pas procédé à des vérifications approfondies des " clients douteux ", malgré ses obligations légales...

Pierre-Antoine Vacheron a affirmé que Worldline avait renforcé ses normes de conformité ces dernières années. L'entreprise a une approche " rigoureuse " envers les commerçants et une tolérance zéro pour les écarts par rapport à ses normes, a-t-il souligné. Le patron de l'ancienne filiale d'Atos a indiqué envisager des poursuites judiciaires contre les médias impliqués....

Un peu plus tôt dans la journée, Worldline avait indiqué dans un communiqué avoir "renforcé son cadre de gestion des risques liés aux commerçants afin d'en assurer la totale conformité aux lois et réglementations" et avoir "mené une revue approfondie de son portefeuille HBR — qui représente actuellement environ 1,5% de ses volumes acquis — et résilié les relations commerciales identifiées comme non conformes à ce cadre renforcé".

Worldline avait également précisé que ces décisions ont concerné des commerçants représentant environ 130 millions d'euros de chiffre d'affaires en année pleine 2024. "À titre indicatif, selon les derniers rapports des réseaux de cartes, notre taux de fraude est inférieur à la moyenne du secteur", a ajouté la société, selon laquelle "tous les clients HBR encore actifs dans ce portefeuille font désormais l'objet d'une surveillance renforcée, basée sur des procédures spécifiques. Des exigences supplémentaires en matière de contrôles, de vérifications et de documentation ont été introduites afin de garantir une conformité continue aux obligations réglementaires et à nos standards internes renforcés".

La jurisprudence Wirecard appelle à la prudence et explique certainement la réaction boursière hier (-38%), explique Invest Securities. Worldline n'est pourtant pas à priori l'entreprise de paiement la plus exposée aux marchands à risque et le nouveau CEO s'est montré hier soir plutôt rassurant en expliquant que les marchands à risque ne pratiquaient pas d'activité illégale et que cela représentait une part marginale de son CA après la décision prise à l'automne 2023 d'arrêter ses relations avec certains marchands compte tenu d'une exigence de conformité renforcée (-140 ME de CA perdu en année pleine). Il n'empêche, les déconvenues s'accumulent et la tâche du nouveau CEO s'annonce encore plus compliquée que prévu, souligne le broker. Dans l'attente du CMD à l'automne prochain qui doit permettre de quantifier la croissance et le désendettement à moyen terme, le courtier maintient son opinion 'sous revue'.

Oddo BHF évoque une grave controverse dont le risque principal est surtout réputationnel dans un secteur où la confiance est primordiale. Il ne faudrait pas qu'elle entraîne des pertes de clients et partenaires importants... Des procédures judiciaires sont également possibles. En plus de cette 'affaire', un preview S1 négatif conduit l'analyste à augmenter significativement la prime de risque dans son modèle DCF et à réduire ses prévisions de résultats. Compte tenu de ses nouvelles hypothèses, le courtier divise par deux son objectif de cours à 2,5 euros et dégrade en conséquence le dossier à 'sous-performer'.

Worldline rebondit de 12% à 3,2 euros à l'ouverture du marché ce jeudi.

Société(s) citée(s) :
https://bourse.fortuneo.fr/actualites/worldline-victime-d-une-campagne-mediatique-orchestree-8488030
Fortuneo