La place américaine peine pour l'heure à trouver sa direction ce mercredi, partagée entre les craintes pesantes de récession et les espoirs d'assouplissement monétaire rapide. Les derniers chiffres des ouvertures de postes aux USA sont ainsi ressortis particulièrement déprimés, ce qui montre que la politique restrictive de la Fed commence à avoir un impact conséquent sur le marché du travail. Ces nouvelles ont eu tendance à faire progresser significativement les anticipations de baisse des taux. Les investisseurs ne parviennent pas pour l'heure à se décider, risquant juste quelques achats timides au lendemain d'une séance de purge menée par le Nasdaq, qui avait perdu 3,3% environ hier avec la chute de Nvidia.
Les principaux indices sont actuellement légèrement dans le vert. Le S&P 500 reprend 0,18% à 5.539 pts, le Dow Jones 0,39% à 41.095 pts et le Nasdaq 0,12% à 17.157 pts, au lendemain d'une brutale correction qui faisait suite à un week-end prolongé du fait du 'Labor Day'. Nvidia, qui décrochait hier soir de 9,5%, s'affiche en légère hausse pour l'heure ce mercredi, en dépit des craintes de plainte antitrust du DoJ.
L'once d'or grappille 0,2% à 2.497$. Le baril de brut WTI fléchit vers les 70$ désormais sur le Nymex. L'indice dollar cède 0,5% face à un panier de devises de référence.
Les craintes relatives à une éventuelle récession outre-Atlantique sont donc de retour. Les indices manufacturiers publiés hier ont été déprimés. L'indice PMI manufacturier américain final du mois d'août 2024 s'est établi à 47,9, très proche du consensus de place qui se situait à 48, ainsi que de la lecture flash (préliminaire) qui était également de 48. L'indice ISM manufacturier américain du mois d'août 2024 s'est affiché à 47,2, contre 47,5 de consensus FactSet et 46,8 un mois auparavant. Ces données signalent une contraction de l'activité manufacturière nationale.
Ce mercredi, le déficit du commerce international des biens et services aux États-Unis pour le mois de juillet 2024 s'est affiché à 78,8 milliards de dollars, en ligne ou presque avec le consensus des économistes de la place, après un déficit révisé à 73 milliards de dollars pour le mois de juin.
Les ouvertures de postes aux États-Unis pour le mois de juillet 2024 se sont établies au nombre de 7,673 millions, contre un consensus de marché de 8,1 millions et un niveau de 7,91 millions pour la lecture révisée en baisse du mois antérieur. La précédente lecture de juin avait été évaluée à 8,18 millions d'unités par le Département US au Travail. Il s'agit donc de faibles chiffres de l'emploi qui devraient alimenter les craintes de récession - ou les espoirs de baisse des taux selon les goûts. Les ouvertures de postes retombent ainsi au plus bas de trois ans et demi en juillet.
Les commandes industrielles américaines du mois de juillet sont ressorties en forte augmentation de 5% d'un mois sur l'autre, contre +4,7% de consensus FactSet et -3,3% un mois avant.
Raphael Bostic, le président de la Fed d'Atlanta, a alerté contre le risque de laisser les taux sur des niveaux restrictifs trop longtemps. Ainsi, le fait de laisser les taux sur des niveaux trop élevés, trop longtemps, pourrait faire courir des risques et affecter trop durement l'emploi, à en croire le responsable. "Nous ne devons pas maintenir une posture monétaire restrictive trop longtemps", a donc résumé Bostic, dans une intervention publiée sur le site de l'antenne régionale de la Fed. Il ne s'agirait donc pas selon lui d'attendre que l'inflation revienne sur l'objectif des 2% avant d'agir, car cela risquerait de provoquer des perturbations sur le marché du travail qui infligeraient "une peine et des souffrances inutiles".
En attendant, et suite également aux mauvais chiffres de l'emploi qui viennent d'être publiés, les attentes concernant la baisse des taux du 18 septembre viennent de s'équilibrer entre 25 et 50 points de base d'après l'outil FedWatch. Ces deux hypothèses affichent ainsi désormais des probabilités proches de 50%. Selon ce même baromètre FedWatch, la probabilité dominante pour le 18 décembre et la dernière réunion monétaire de l'année est celle d'une fourchette allant de 4,25 à 4,50% ('proba' de 40,5%), ce qui représenterait une baisse des taux d'un point de pourcentage. La probabilité de la fourchette 4-4,25% est de 34%.
Demain, les investisseurs suivront la dernière étude Challenger, Gray & Christmas sur les annonces de licenciements aux Etats-Unis (13h30), ainsi que le rapport d'ADP sur l'emploi privé du mois d'août (14h15, consensus FactSet 143.000 créations). Les inscriptions hebdomadaires au chômage (14h30, consensus 230.000), les chiffres finaux de la productivité du deuxième trimestre (14h30, consensus +2,3%, +0,9% pour les coûts unitaires du travail), ainsi que les indices PMI composite final (15h45, consensus 54,1 avec un indice des services attendu à 54,7) et ISM des services (16 heures, consensus 51,1), seront révélés le même jour.
Enfin, le rapport gouvernemental mensuel sur la situation de l'emploi aux USA pour août 2024 sera dévoilé vendredi, le consensus FactSet étant de 160.000 créations de postes dont 140.000 dans le privé, pour un taux de chômage de 4,2%. Il s'agira d'un test important, de tels chiffres en léger redressement par rapport à juillet étant susceptibles de dissiper les craintes de récession - ou au contraire de les alimenter en cas de mauvaise surprise.
Dans l'actualité des entreprises à Wall Street, après des résultats peu appréciés de Nvidia la semaine dernière, les opérateurs suivaient hier soir les comptes de Zscaler, assortis de prévisions décevantes. Copart (après bourse), C3.ai (post-séance), Ciena (avant bourse), Caseys General Stores, Hormel Foods (pré-séance), Dollar Tree (avant l'ouverture), Dick's Sporting Goods (pré-séance) et Hewlett Packard Enterprise (après bourse), annoncent ce mercredi. Nio Inc et Toro Company publient avant bourse demain, tandis que Broadcom, Samsara, Guidewire, DocuSign et UiPath annoncent après la clôture.
Les valeurs
Nvidia (+1%), géant des processeurs graphiques et d'IA, fait dans la démesure en bourse, que ce soit en hausse ou en baisse. Hier soir à Wall Street, sans actualité majeure jusqu'à la clôture, le titre a dévissé de 9,5% à 108$, effaçant près de 300 milliards de dollars de capitalisation boursière en une seule séance ! Le titre creusait par ailleurs ses pertes après bourse, les opérateurs digérant les rapports de médias relatifs à une enquête du Département américain de Justice. Il tente de se reprendre désormais ce mercredi... Bloomberg, citant des personnes proches de l'enquête, a ainsi rapporté hier que le DoJ américain, ministère de la Justice, "avait envoyé des assignations à comparaître à Nvidia et à d'autres sociétés alors qu'il cherchait des preuves que le fabricant de puces avait enfreint les lois antitrust".
L'article de Bloomberg est tombé toutefois après la clôture hier soir, n'expliquant pas vraiment la purge brutale de la journée. Fin août, le titre avait déjà corrigé dans la foulée de l'annonce d'un chiffre d'affaires trimestriel pourtant record de 30 milliards de dollars, en hausse de 15% par rapport au premier trimestre et de 122% par rapport à l'année dernière. Le chiffre d'affaires trimestriel des centres de données de 26,3 milliards de dollars établissait lui aussi un sommet, en hausse de 16% par rapport au premier trimestre et de 154% par rapport à l'année dernière. Les chiffres illustrent toutefois une potentielle décélération de la croissance exponentielle du groupe. Pour le trimestre écoulé, le bénéfice ajusté par action a été de 0,68$, en hausse de 11% par rapport au trimestre précédent et de 152% par rapport à l'année dernière.
Les revenus sont attendus à 32,5 milliards de dollars, plus ou moins 2%, sur le troisième trimestre fiscal, selon la guidance du groupe fin août. Les marges brutes GAAP et non-GAAP devraient être respectivement de 74,4% et 75%, plus ou moins 50 points de base. Pour l'ensemble de l'année, les marges brutes devraient se situer autour de 70%... Malgré la chute d'hier, les actions Nvidia ont plus que doublé jusqu'à présent cette année... Le cours de bourse a même décuplé depuis l'été 2020, et il est multiplié par huit depuis le creux d'octobre 2022 ! En attendant une possible plainte antitrust formelle, la question dominante est celle de la valorisation boursière et donc de la capacité de Nvidia a maintenir une forte part de marché et des marges élevées.
AMD (+4%) a annoncé que Keith Strier avait rejoint l'entreprise en tant que vice-président senior des marchés mondiaux de l'IA. Strier possède plus de 30 ans d'expérience dans le développement stratégique d'activités et de marchés, dans l'ingénierie technique et dans la réalisation de déploiements responsables d'IA. Il a récemment occupé le poste de vice-président des initiatives mondiales en matière d'IA chez Nvidia, avec la responsabilité de développer les engagements commerciaux avec les gouvernements étrangers. Chez AMD, il sera chargé d'élargir la vision de l'IA de l'entreprise, de piloter de nouvelles capacités d'écosystème et d'accélérer les engagements stratégiques en matière d'IA à l'échelle mondiale dans les secteurs public et privé. Il rapporte au vice-président exécutif et directeur de la technologie d'AMD, Mark Papermaster.
Zscaler, le spécialiste américain de la sécurité du cloud, décroche de 16% à Wall Street, sur des prévisions financières annuelles inférieures aux attentes. Le groupe a pourtant affiché des comptes trimestriels quant à eux supérieurs aux anticipations. Pour son quatrième trimestre fiscal, le groupe a affiché un bénéfice ajusté par action de 88 cents, contre 69 cents de consensus. Les revenus ont été de 593 millions de dollars sur ce trimestre clos fin juillet, contre 568 millions de consensus. Pour le premier trimestre fiscal 2025 juste entamé, le groupe prévoit des revenus de 604 à 606 millions de dollars, à comparer à un consensus de 603 millions. Le bpa ajusté sur la période est attendu entre 62 et 63 cents, ce qui ressortirait également moins élevé que prévu. Sur l'exercice 2025, le groupe envisage des revenus allant de 2,60 à 2,62 milliards de dollars, à comparer à un consensus de 2,63 milliards. Enfin, le bpa ajusté annuel est anticipé entre 2,81 et 2,87$, bien loin du consensus des brokers qui atteignait environ 3,3$.
Hormel Foods (-7%), le groupe alimentaire américain connu pour ses viandes précuites, dévisse à Wall Street suite à un avertissement sur les ventes, sur fond notamment de baisse des prix et de perturbations de production. Le groupe a affiché au titre de son troisième trimestre fiscal des revenus de 2,9 milliards de dollars en retrait de 2%, pour un bénéfice ajusté par action de 37 cents à rapprocher d'un consensus de 36 cents. Pour l'exercice 2024, le groupe ajuste ses perspectives et ne prévoit plus désormais qu'un chiffre d'affaires allant de 11,8 à 12,1 milliards de dollars. Le bénéfice ajusté annuel par action est anticipé entre 1,57 et 1,63$, soit un resserrement de la guidance antérieure. La baisse des prix des produits d'exportation en gros volume, tels que la dinde et le porc frais, a pesé considérablement sur les activités. Un problème de sécurité alimentaire dans l'usine de Suffolk, en Virginie, a également eu un impact négatif sur les volumes de vente au détail aux États-Unis au cours du trimestre clos fin juillet.
Ciena (+2%) a publié pour le troisième trimestre fiscal un bénéfice de 14 millions de dollars soit 10 cents par titre, ainsi qu'un bpa ajusté de 35 cents à comparer à un consensus de 26 cents. L'équipementier de réseau a réalisé sur la période des revenus de 942 millions de dollars contre 929 millions de dollars de consensus.
Dollar Tree (-19%) a abaissé ses prévisions annuelles et plonge donc ce mercredi à Wall Street. Le détaillant discount américain a annoncé pour son deuxième trimestre un bpa ajusté de 67 cents, largement inférieur au consensus, pour des ventes quasiment stables à 7,38 milliards et une croissance à comparable de 1,3%. Les ventes consolidées annuelles sont anticipées entre 30,6 et 30,9 milliards de dollars, contre 31-32 milliards auparavant envisagé.
Blackstone (stable) s'offre AirTrunk dans le cadre d'un accord valorisant l'opérateur australien de centres de données à 24 milliards de dollars australiens, soit environ 16 milliards de dollars américains - y compris la dette et les dépenses en capital pour les projets engagés. Le géant américain de la gestion d'actifs, en collaboration avec le Canada Pension Plan Investment Board, rachète donc AirTrunk à Macquarie Group et à PSP Investments. La transaction est en attente de l'approbation réglementaire de l'Australian Foreign Investment Review Board. Le deal constitue le plus gros investissement jamais réalisé par Blackstone dans la région Asie-Pacifique, dépassant l'opération portant sur l'opérateur de casino australien Crown Resorts en 2022.