Trop concentré ce marché américain ? Les rendements du S&P 500 dépassent désormais ceux du Stoxx Europe 600 cette année, en monnaie locale, après un rattrapage remarquable de l'indice de référence américain. Mais cette évolution est presque entièrement portée par une poignée de sociétés. De quoi inquiéter ? Certes, la croissance des bénéfices est plus forte aux États-Unis, mais là encore, elle est due à quelques valeurs. Elle s'est concentrée sur les mégacapitalisations technologiques, qui ont représenté 90% de la croissance globale, détaille 'Bloomberg'. Seuls cinq membres du S&P 500 ont contribué à hauteur de 69% à la performance de l'indice en 2025, tandis que celle-ci est répartie entre 16 valeurs du Stoxx 600.
Avec des niveaux de concentration contrastés et des moteurs différents, la répartition des secteurs dominants sur les marchés européens et américains est plus divergente que jamais, ajoute l'agence. En Europe, les actions 'value' et les petites capitalisations ont mené la reprise, contribuant à élargir les gains. Aux États-Unis, les gains proviennent principalement des actions de croissance à très forte capitalisation, combinées à des transactions spéculatives sur des thèmes tels que les titres les plus vendus à découvert et les actions 'mèmes'. "En Europe, la largeur du marché a été particulièrement forte cette année ", affirment les stratèges de Goldman Sachs. "Cela suggère qu'un plus grand nombre d'actions participent à la variation des prix, ce qui témoigne d'une tendance saine et durable".
Les 10 plus grandes entreprises ne représentent que 17% du Stoxx 600, et même cette domination s'est réduite récemment. En revanche, la concentration est proche de niveaux records aux États-Unis, les 10 plus grandes entreprises représentant 39% du S&P 500. Dans l'indice MSCI World, ce chiffre est de 28%, ce qui crée un problème de diversification dans les portefeuilles mondiaux. "Les mesures de diversification ont atteint de nouveaux planchers tant dans le MSCI World que dans le S&P 500", explique à l'agence Andrew Lapthorne, stratégiste chez Société Générale. Il souligne que ces 10 mêmes actions représentent également un tiers des bénéfices du S&P 500 et un cinquième des profits mondiaux. "Une telle concentration peut paraître impressionnante sur le papier, mais elle a un prix élevé : l'érosion de la diversification, laissant les portefeuilles de plus en plus exposés à une part étroite du destin du marché".
Les stratèges de Bank of America, dirigés par Michael Hartnett, affirment que la concentration des rendements aux États-Unis est renforcée par une politique favorable au monopole et à l'Amérique d'abord, ainsi que par le rythme de développement de l'intelligence artificielle, qui est sur le point de bouleverser le marché du travail américain. La concentration des rendements boursiers américains continuera de s'accentuer jusqu'à ce que les spreads de crédit dans le secteur technologique s'élargissent, signalant que la consommation de trésorerie liée à l'IA menace les paris effrénés des investisseurs et des entreprises, à l'instar de la bulle Internet qui se formait en 1999...
Le marché européen apparaît ainsi plus sain, plus diversifié et moins risqué. Du moins, sur le papier.