La France détruit sa base industrielle par une surimposition, avertit Florent Menegaux, DG de Michelin. "Vous tuez économiquement votre pays lorsque vous imposez des taxes beaucoup plus élevées que dans d'autres pays", déclare le DG du fabricant de pneumatiques dans une interview accordée à 'Bloomberg' à Paris. "À l'heure actuelle, la fiscalité directe et indirecte en France est la plus élevée d'Europe. Il ne faut pas s'attendre à ce que les entreprises puissent encaisser cela tout le temps".
Le patron de Michelin fait partie des chefs d'entreprise français qui avertissent sur le fait que la crise gouvernementale prolongée a mis en suspens les embauches et les investissements. Des impôts plus élevés dans le pays, associés à une baisse de la demande dans l'industrie automobile en Europe, ont forcé Michelin à fermer trois usines en Allemagne, deux en France et une en Pologne. Produire en Europe coûte deux fois plus cher qu'en Asie, un écart qui s'est considérablement creusé depuis 2019, selon le dirigeant : "nous devons réadapter notre empreinte industrielle en Europe pour exporter moins car ce n'est pas rentable". L'entreprise compte 50.000 salariés en Europe, dont près de 18.000 en France.
L'agence souligne que pour Michelin, comme pour d'autres grands groupes industriels européens, les inquiétudes dans la région - notamment les coûts élevés de l'énergie et de la main-d'oeuvre et les lourdeurs administratives - sont aggravées par la probabilité croissante d'une guerre commerciale alors que le président américain Donald Trump multiplie ses menaces de tarifs douaniers. " Attendons de voir, mais dans un monde globalisé, les mécanismes sont très complexes ", souligne le DG. "Si vous commencez à imposer des tarifs douaniers, il devient très, très délicat de comprendre quelles en seront les conséquences". Il avertit que cela pourrait signifier des pneus plus chers pour les consommateurs américains.
Concernant plus précisément Michelin, le groupe clermontois est à la recherche d'acquisitions complémentaires, mais l'entreprise n'exclut pas des fusions et acquisitions plus importantes, selon F.Menegaux. Elle dispose d'un bilan "très solide" et d'un niveau d'endettement limité, ce qui lui donne une puissance de feu importante : "sans demander l'aide du marché, nous pourrions lever jusqu'à 10 milliards d'euros pour faire ce que nous voulons". L'entreprise n'a "aucun projet pour le moment, mais tout est ouvert"... En outre, le dirigeant estime que les lois sur la concurrence en Europe " doivent être révisées " pour permettre des transactions transfrontalières qui peuvent renforcer les acteurs de la région dans un contexte de concurrence asiatique acharnée.