Deezer franchit un nouveau cap dans la lutte contre les abus liés à l'intelligence artificielle (IA) dans le streaming musical... La plateforme française a annoncé ce vendredi le lancement du premier système mondial d'étiquetage permettant d'identifier les albums contenant des titres générés exclusivement par IA. Cette initiative doit permettre d'instaurer plus de transparence pour les utilisateurs et à défendre les droits des créateurs.
"Nous constatons une hausse marquée de la musique générée par intelligence artificielle ces derniers mois, et cette dynamique ne montre aucun signe de ralentissement", a déploré Alexis Lanternier, directeur général de Deezer, ajoutant que "c'est un enjeu majeur pour l'ensemble du secteur, et nous entendons jouer un rôle moteur en matière de transparence, en permettant aux auditeurs d'identifier facilement les albums intégrant ce type de contenu".
Pour concevoir ce système, Deezer s'est appuyé sur deux brevets déposés fin 2024, chacun reposant sur une méthode différente pour reconnaître les marques propres aux morceaux synthétiques. La plateforme de streaming musical assure que cette technologie peut fonctionner même sans base de données d'apprentissage spécifique, grâce à un mécanisme de détection généralisée.
70% d'écoutes jugées artificielles
Selon les données de Deezer, près de 18% des titres mis en ligne chaque jour sur la plateforme, soit plus de 20.000 morceaux, seraient entièrement générés par des modèles d'IA comme Suno ou Udio. Pourtant, ces contenus restent très peu consommés, ne représentant qu'environ 0,5% des écoutes.
Mais au-delà de leur faible audience, c'est surtout leur caractère frauduleux qui inquiète. Deezer estime que près de 70% des écoutes de ces morceaux sont artificiellement gonflées. "Lorsqu'une manipulation de streams est détectée, ces écoutes sont automatiquement exclues du calcul des rémunérations", a précisé la plateforme, qui entend ainsi protéger les revenus des artistes. Par ailleurs, Deezer a choisi de ne plus inclure les titres 100% IA dans ses recommandations, qu'il s'agisse des suggestions automatisées ou des playlists éditoriales. Cette décision vise à préserver la qualité de l'écoute tout en évitant que des morceaux entièrement synthétiques ne détournent une partie des revenus destinés aux artistes.
Dans un contexte où les inquiétudes sur l'usage d'oeuvres protégées pour l'entraînement des IA se multiplient, Deezer réaffirme son engagement. L'entreprise est à ce jour la seule plateforme signataire de la déclaration mondiale sur l'entraînement des IA. Elle rappelle également qu'une étude menée par la CISAC estime que l'IA pourrait faire perdre jusqu'à 4 milliards d'euros aux créateurs d'ici 2028, soit 25% de leurs revenus.