Automobile: faute d'une fusion, équation complexe pour Honda et Nissan...

Automobile: faute d'une fusion, équation complexe pour Honda et Nissan

Honda et Nissan rêvaient de s'associer pour rattraper leur retard dans l'électrique et rivaliser avec les constructeurs chinois: l'échec de leur projet de fusion, officialisé jeudi, assombrit leurs perspectives dans un marché automobile mondial sous pression et devrait les pousser à chercher d'autres alliés.

L'automobile, secteur dans la tourmente

Honda et Nissan sont respectivement le deuxième et le troisième constructeurs japonais derrière Toyota, numéro un mondial.

Comme l'essentiel de l'industrie automobile mondiale, ils sont confrontés à l'essoufflement du marché et à la transition compliquée et coûteuse dans l'électrique, créneau dominé par les constructeurs chinois, BYD en tête.

Dopée par l'essor de l'électrique, la Chine a dépassé le Japon comme premier pays exportateur de véhicules en 2023. Focalisés jusqu'ici sur les hybrides (associant motorisation thermique et électrique), les japonais ont raté l'essor du tout-électrique.

A l'instar de l'allemand Volkswagen, les constructeurs nippons souffrent aussi en Chine, premier marché mondial, où leurs ventes s'effritent fortement face à une consommation maussade et à la concurrence acérée des marques locales.

Au total, Nissan a écoulé 3,35 millions de véhicules dans le monde l'an dernier, un repli de 0,8%. Honda a vu ses ventes plonger à 3,8 millions d'unités (-4,6%), tandis que sa production mondiale fondait de presque 11%. Par contraste, le chinois BYD a vu ses ventes s'envoler de 41% l'an dernier.

Et le tableau pourrait s'assombrir encore avec les barrières douanières érigées par Donald Trump: Honda écoule la moitié de ses véhicules en Amérique du Nord, et les Etats-Unis restent un marché crucial pour Nissan.

Echec d'un mariage inégal

Massivement endetté, Nissan avait vu ses ventes plonger sur la période juillet-septembre aux Etats-Unis comme en Chine, entraînant une perte nette trimestrielle inattendue, avec une marge opérationnelle presque disparue.

Début novembre, le groupe avait annoncé supprimer 9.000 postes dans ses effectifs mondiaux et tailler dans ses capacités.

Dans la foulée, Honda et Nissan ont ouvert en décembre des négociations en vue d'une fusion pouvant donner naissance en 2026 au troisième constructeur mondial --en y associant leur compatriote Mitsubishi.

La perspective alors esquissée était de regrouper les deux groupes au sein d'une holding unique, afin d'associer leurs forces pour mieux négocier le virage de l'électrique.

Les économies d'échelle réalisées auraient permis de "renforcer les capacités de recherche et développement et de mieux concurrencer les pionniers" de l'électrification et des logiciels embarqués, souligne Tatsuo Yoshida, analyste de Bloomberg Intelligence.

Mais Honda, en position de force, a finalement réclamé de transformer Nissan en simple filiale: un scénario inacceptable pour Nissan, soucieux de préserver son autonomie.

"Nissan semble mettre l'accent sur son indépendance et sa liberté de décision en matière de stratégie", ce qui "pour Honda ne maximisait pas forcément les économies d'échelle", a souligné Yoshitaka Ishiyama, analyste chez Mizuho Securities.

Honda, par ailleurs, avait d'emblée insisté qu'il ne s'agissait pas pour lui de secourir son partenaire, sommé de concrétiser préalablement ses transformations structurelles.

Enfin, "Nissan et Honda partagent les mêmes difficultés et sont pratiquement face-à-face sur tous leurs marchés (Etats-Unis, Chine, Japon)", rendant peu évidentes les complémentarités, a indiqué à l'AFP une source proche du dossier.

Nissan dans l'impasse, l'appétit de Foxconn ravivé

Nissan reste dans une situation précaire: "il fait face à des défis importants, notamment l'instabilité financière et la nécessité de renforcer sa position sur le champ de bataille technologique", insiste M. Yoshida.

Affaibli, Nissan suscite les convoitises: le géant taïwanais de l'assemblage électronique Foxconn (Hon Hai), fournisseur d'Apple et désireux de se diversifier, avait déjà approché le constructeur nippon à l'automne pour acquérir une participation majoritaire, selon Bloomberg.

Or, le président de Foxconn, Young Liu, a reconnu mercredi auprès de Bloomberg être ouvert au rachat de la participation d'environ 35% que possède le constructeur français Renault dans Nissan.

D'un autre côté, "si Honda veut vraiment la technologie de Nissan, il peut lancer une OPA hostile" sur l'entreprise, commente Seiji Sugiura, analyste de Tokai Tokyo Intelligence Laboratory.

Dans tous les cas, "il est peu probable que Nissan revienne à son alliance avec Renault et Mitsubishi, car Renault semble surtout désireux de vendre ses parts au prix le plus élevé possible", ajoute-t-il.

Honda en quête d'autres partenaires, l'option Foxconn

Honda pourrait lui aussi se mettre en quête d'alliés. "Les inquiétudes persistent sur la manière dont il pourra renforcer son activité de voitures, bien que sa branche motos reste robuste" --créneau où il reste numéro un mondial, indique Seiji Sugiura.

"Le fait que les dirigeants de Honda aient voulu fusionner avec Nissan montre qu'ils ont besoin d'une collaboration étroite en recherche et développement à un niveau plus profond qu'une alliance, ce qui implique le partage d'informations confidentielles", rendant d'autant plus délicat le choix d'un partenaire, ajoute-t-il.

Or, Foxconn --en recherche d'un partenaire dans le monde automobile-- a indiqué mercredi être aussi bien en discussions avec Honda qu'avec Nissan.

Honda pourrait se lier avec lui, car le géant taïwanais possède "des technologies que Honda convoite" en matière d'électronique embarquée, estime M. Sugiura.

© 2025 AFP

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